mn (XXIV)

Sans lumière. Sans mouvement. J’attends le silence mais ne parviens à l’entendre. Le silence de l’âme. Le silence du monde. Son vacarme est si pesant, lancinant et indéfectible. Sa continuité chuintante est à l’image de son inconsistance. Juste rien, seulement un long borborygme, cuisant. Peut-être l’unique preuve de l’existence du néant. Le vide se doit de faire du bruit pour nous rappeler son existence, sa présence. Mon espérance est différente. Je dois parvenir à  atteindre le silence. Me confondre avec le mystère. Ne plus être ni émetteur ni récepteur. Entre les deux, là. Invisible à tout. Insensible. Éloigné de toute pensée et de tout lieu. Là où je suis, là où je vis, dans mon isolement, je n’en finis pas. Tout est agression au silence. Je me penche encore à la fenêtre. Il est encore temps. Et je m’interroge, naïvement: quelles musiques propagent les étoiles que j’observe? Et derrière les étoiles, y-a-t-il ces bourdonnements? De quelles couleurs se fardent-elles? Quelles effluves dégagent-elles? Existe-t-il, quelque part, un arc-en-ciel du silence? Je me balade, en vain, entre ici et là-bas. Les blessures me tiraillent, sans cesse. Elles ne savent pas se faire discrètes. Je n’ai pas faim. Je n’ai pas soif.
Rien ne se passe. Non! Rien ne se déroule véritablement comme on semble le vivre. Je ne vois, je n’entends, je ne sens qu’une infime partie de ce que je vis profondément. Je me dessèche, goutte après goutte. Il n’y a aucune forme de combat envisageable, seulement le flux. Et je m’implique sans volonté. Je n’en perçois pas la destinée. En suis-je le maître? Suis-je libre et souverain de ce que je suis? De ce que je deviens? Je sens de nouveau cette fureur intarissable m’envahir. Elle crispe tous les muscles de mon corps. Et les tremblements ne se font pas attendre. Ni les gouttes de sueur qui perlent sur mon front. Ni les mâchoires qui se resserrent à en faire éclater l’émail de mes dents. Les poings fermés. Le corps entre en tension extrême. La nuque se raidit. Les poils s’hérissent sur l’intégralité de ma peau meurtrie par cette présence au monde inexplicable.
Le désir animal de m’époumoner. Hurler comme une bête à l’agonie que l’on n’ose sacrifier. Que l’on ne peut achever sans douleur. Par indifférence. Par déférence. Par ignorance. Suis-je capable de décider? Je ne crois pas. Ai-je la capacité de changer les occurences? Je n’en ai pas l’impression.

à suivre… mn (XXV)

4 réflexions au sujet de « mn (XXIV) »

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  2. Denise (Soupir59)

    … quelles musiques propagent les étoiles que j’observe? (une seule, celle d’un silence scintillant)…Xavier ce texte m’a particulièrement chamboulé…Je vais revenir pour te lire très bientôt…tellement de retard à rattraper. Amicalement, Denise

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